Marguerite n'aime pas ses fesses...
Une journée comme je les aime on est début décembre nous finissons de traîner dans Bordeaux tiens, la rue des Argentiers tiens, la librairie La Mauvaise Réputation... alors nous en poussons la porte, évidemment.
La femme que j'aime ausculte la galerie d'art et moi je demande au taulier "vous auriez un récit de voyage... ou celui d'une cavale plutôt... pas un roman je voudrais un récit" Rodolphe me met entre les mains le bouquin de gilles Bertin "merci non je l'ai déjà lu... excellent d'ailleurs, merci" on échange alors deux trois mots sur ce punk braqueur auteur d'une cavale de près de 30 piges... "tiens, il était là en dédicaces juste 3 4 semaines avant que le crabe ne l'emporte..."
"Sinon j'ai ça, si vous voulez du costaud, du vécu... j'ai ça"
"J'écoute du rock" voilà un incipit acceptable. Le lien avec Eagles of Death Metal est évident, on y arrivera par les chemins détourés de ton éducation musicale, parfait ! Un objet littéraire, et puis quoi, encore ? Tu n'as pas les épaules.
Les HURLEMENTS. Au-delà des mots. Au-delà de l'imagination. Vous n'en saurez jamais rien, des HURLEMENTS, quelle que soit la plume.
Je pénètre dans la salle. Sensations familière, plénitude immédiate : un concert de rock. Je souris. Je suis bien.
Noir. Cris de joie. Acclamations. Je souris. Je suis bien. Parmi les miens. Le groupe arrive sur scène. Mani cornute tendues vers le ciel dans toute la salle. Premiers riffs, premiers larsens, du rock, de l'énergie, en communion, putain ce que c'est bon !
À 21 h 40 ou 42 , ou 47 ils ne sont pas fichus de se mettre d'accord, bruits de pétards, les musiciens se figent puis quittent la scène en courant, des cris, du mouvement, ce ne sont pas des pétards, "Couchez-vous ! Couchez-vous !" Je me jette au sol.
Là commence le roman - à moins qu'il n'aît commencé sans me prévenir.
Erwan Larher n'habite pas à Paris, il va écouter un concert au Bataclan, il porte des santiag et il prend une balle dans les fesses. Oui, il est "défiguré du cul" comme il le dit lui-même. A partir de ce moment il ne souhaite qu'une chose une seule, être un caillou et rentrer dans le sol... plus tard beaucoup plus tard, il voudrait également rebander, pour l'instant être un caillou, juste un caillou.
En deux jours j'ai lu ce livre qu'il ne voulait pas écrire et je m'en suis pris plein la gueule. Je remercie Rodolphe d'être un bon libraire.